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[EXCLU -I sur III] F. Da Cruz : "Nous avons travaillé pour l'avenir du club"


Fernando Da Cruz fait le bilan de ses années à la tête du centre de formation du LOSC. Loin des polémiques stériles, il nous a semblé utile de revisiter la politique des années Lopez-Campos-Galtier au travers de l'action du directeur du centre de formation nommé par Luis Campos, Fernando Da Cruz. Freiné par le covid et le départ brutal du président et de son entourage, cette politique n'a pu porter ses fruits et ne peut être comparée aux glorieuses années du LOSC avec le duo Seydoux-Vandamme qui, à son apogée, avait fait du LOSC une équipe championne de France, vainqueur de la Coupe de France, avec moins de moyens et avec pas loin de 50% de son effectif issu de sa formation.

 

 

AVERTISSEMENT

Depuis de nombreuses années, le SEUL objet d'AllezLILLE.fr est de mettre en avant les jeunes pousses du LOSC, les jeunes qui travaillent année après année en espérant un jour atteindre le graal, un contrat pro au sein de son club formateur. Une de nos plus grandes joies a été, plus que le titre obtenu cette année, le doublé Coupe-Championnat obtenu en 2011, sous l'impulsion du duo Seydoux-Vandamme. Il y avait alors plus de 50% de joueurs formés au club, les Cabaye, Debuchy, Dumont, Hazard...

L'arrivée du duo Lopez-Campos a donné plus de moyens au centre de formation et à son directeur d'alors Fernando Da Cruz. Des joueurs de qualité sont arrivés mais on peut regretter qu'aucun n'ait intégré le groupe pro pour y jouer. Le seul joueur que Christophe Galtier a utilisé a été Cheikh Niasse. C'était lors d'un match d'Europa League et le milieu avait évolué au poste de latéral droit, un poste qu'il n'avait jamais occupé. Pas le meilleur moyen de lui donner de la confiance. Fernando da Cruz et son équipe avaient bâti un projet dont on ne saura jamais s'il aurait pu aboutir.

Mais notre sentiment profond reste que la politique mercantile de Luis Campos aurait écarté du plus haut niveau des éléments qu'il n'aurait pas choisi. On peut s'étonner par exemple du choix de ne pas avoir donné sa chance à un Darly Nlandu, si prometteur lors d'un stage d'avant saison il y a deux saisons de cela et que l'on n'a plus jamais revu depuis en pro à Lille.

 

 

 

Fernando, vous avez été remplacé à la tête du centre de formation par Jean-Michel Vandamme. Quel est votre sentiment ?

D’abord j’aurai aimé que cela se fasse différemment compte tenu de mon passé au club et des services que j’ai rendus. Je suis très content que le LOSC soit champion. Le Losc c’est le club de mon enfance et avoir eu la chance d’y avoir travaillé plus de 20 ans fut un réel plaisir.

Je n’oublierai jamais mon intérim avec Joao Sacramento entre Bielsa et Galtier, la victoire à Lyon reste un superbe souvenir. Nous avons pris sept points et avons contribué au maintien. Derrière, il y a eu l’arrivée de Christophe Galtier. Ce fut le début d’une aventure qui, durant 4 ans, a permis au Losc d’être performant et champion de France. Ce sacre est l’aboutissement d’un projet d’une grande intensité avec comme chef d’orchestre et architecte Luis Campos, l’un des meilleurs directeurs sportif au monde. Il a donné au club une dimension comme personne n’a réussi à le faire jusqu’ici et je pense pour longtemps encore .

Je profite pour le remercier pour tout ce qu’il m’a apporté durant cette période.

 

 

Quelle démarche avez-vous suivi depuis votre nomination à la tête du centre (au départ de Jean-Michel Vandamme) ?

Lors de ma prise de fonction, la feuille de route était de faire des économies et de réorganiser la formation. Nous sommes passé de 15 temps plein à 8 temps plein. Nous avons été obligés de cumuler les fonctions pour économiser 1,5 millions d’euros. L’état d’esprit a été remarquable. Avec Luis on avait mis en place une stratégie autour de quatre axes fondamentaux. Mais le covid nous a empêchés d’aller au bout. Mais, même avec la tempête, on a suivi le projet.

Pour que la politique mise en place porte ses fruits, il aurait fallu 3-4 ans. Avec la pandémie, on n’a eu que dix huit mois.

 

 

Quels sont ces quatre axes fondamentaux?

-1- Le premier relève de la compétence des éducateurs.

A mon arrivée, il n’y avait aucun éducateur diplômé d’état à l’éveil. Aujourd’hui, toutes les équipes disposent d’éducateurs diplômés d’états.

-A la formation il n’y a que des DES, Formateurs et licence UEFA Pro.

-Organiser des séminaires internes sur l’analyse d’équipes de haut niveau et de confronter ces analyses (un travail remarquable de la part des éducateurs).

-Il y avait aussi la volonté de préparer les anciens joueurs du clubs (Pichot,Wimbée,Dumont) qui avaient une expérience joueur importante et leur fournir une expérience terrain afin qu’ils puissent à court terme intégrer le staff professionnel. Parce qu’il était fondamental de garder les valeurs du club avec d’anciens joueurs.

Je peux vous dire par exemple qu’aujourd’hui Greg Wimbée est prêt pour intégrer le staff pro du Losc .

-2- Le second correspond au modèle de jeu développé

Il était calqué sur le modèle des pros. L’équipe réserve s’entraînait aux mêmes horaires que l’équipe première et les échanges étaient nombreux. Cela a eu des résultats. Quand Aguibou Camara a intégré l’équipe première lors d’un match de Coupe de France contre Dijon. Il n’a pas été dépaysé. Il savait exactement ce qu’il avait à faire parce qu’il l’avait répété mainte et mainte fois avec nous à l’entrainement. Cela relève d’une logique simple qui consiste à créer un modèle de jeu commun et une vraie identité de jeu .  Christophe ne doit pas perdre de temps à l’entrainement avec le jeunes joueurs. On a donc pris le parti de travailler pour eux et avec eux .Joao Sacramento a été un relais extrêmement important entre les pros et la formation.

Ce processus nous l’avons décliné sur toute la formation parce que nous avions pris le pari de jouer avec des équipes rajeunies ce qui impliqué des passerelles importantes et encore avec la volonté de gagner du temps. Cela s’est avérer utile lors qu’il a fallu enchainer les compétitions N2 et Youth League.

-3- Le troisième est en rapport avec la méthodologie utilisée

Nous avons utilisé la périodisation tactique . Je tiens à préciser qu’il n’y a pas de vérité en football. Le plus important est de croire en ce que l’on fait et nous avons cette conviction qu’elle était la plus adapté à notre projet. On ne voulait pas rentrer dans le débat méthode globale/méthode analytique (qui n’a aucun sens à mes yeux ),ou comparer attaque placée/attaque rapide. Le football est un tout et on ne peut pas le dissocier. Nous partions du constat qu’un joueur doit passer le plus de temps possible sur le terrain pour s’entrainer et progresser.

Nous l’avons donc décliné des pros aux plus petits avec les spécificités liées à chaque catégorie ,cela nous a donné beaucoup de satisfaction sur plusieurs points.

- Peu de blessés, notre pourcentage de joueurs disponibles (les équipes ayant le moins de blessés) était l’un des plus importants d’Europe. Nous avons réussi la saison dernière à enchainer les compétitions (championnat N2 et Youth league ) en jouant tous les 3 jours quasiment sans blessés.

- Nous avions des joueurs frais mentalement

- Cette méthodologie associée à notre modèle de jeu nous permettait d’avoir des équipes flexibles.

 Il faut s’avoir que des clubs comme Lorient sont venus voir comment on travaillait, Lyon devait venir avec une délégation de 6 personnes .

On a été innovants et performants dans le développement des joueurs reconnu aussi. Nous sommes intervenus sur des séminaires de la fédération belge et au Canada. La DTN avait aussi prévu une observation du travail effectué au centre de formation .

 -4- Le quatrième concerne le recrutement

 La stratégie consistait à moyen terme de compenser le départ d’un joueur pro et le remplacer par un joueur du centre ayant les mêmes caractéristiques avec un processus de vente adapté à l’éclosion et la maturité de notre joueur. Cela nous a conduit à repenser notre stratégie et de lier notre recrutement à notre modèle de jeu ,en recrutant des joueurs ayant les caractéristiques pouvant s’y intégrer.

Lors de mon retour de Mouscron en 2015, en tant que responsable du recrutement du centre, les critères étaient surtout physiques. Ma première action a été de modifier les critères de recrutement en privilégiant la technique et la compréhension du jeu. Les générations 2001/2002 avaient un niveau qui n’était pas suffisant avec les exigences du Losc. On ne pouvait pas s’appuyer sur la préformation et on a été obligés de recruter. L’année où l’on a été vice-champion de France U17, dans le 11 de départ, seuls deux "2002" venaient de la préformation, ce qui n’est pas normal .

On a toujours privilégié le recrutement régional. Luis Campos me donnait cette liberté. A chaque fois que j’ai proposé un joueur pour le centre, il l’a toujours approuvé. On a essayé d’être fort dans la région. Avoir les meilleurs faisait partie de notre travail. C’est seulement quand on ne trouvait pas un profil adapté que l’on cherchait ailleurs. Tous les clubs ont cette pratique. D’ailleurs, Rennes et le PSG sont souvent vus au pôle espoir de Liévin.

Lors d’une réunion de travail avec Luis à Midtjylland lors du match de Youth League, il avait décidé de privilégier les jeunes de 15-16 ans dans notre programme de recrutement. Hélas, 3 semaines après nous étions en plein Covid. Nous avons commencé un travail de réduction du nombre de joueurs au sein du centre pour permettre à tous d’avoir du temps de jeu et ainsi de les évaluer avec objectivité. Sur la saison 21/22 il était prévu 65 environ et ainsi augmenter l’exigence .

N’oublions pas les Cheick Niasse, Darly N’Landu, Lucas Chevalier et les Bouanani, Kalumba, Yoro, Buayi-Kiala font partie d’un recrutement régional et sont ou ont été internationaux.

 

Propos recueillis par Stéphane HELBECQUE

 

Suite à venir...partie II sur les résultats, le classement du centre ...